Essai Ninja 1000SX 2020
Seule au monde ?
Choisir une moto, tâche qui peut s’avérer facile lorsqu’on sait exactement ce que l’on veut, et autrement plus complexe lorsqu'on est hésitant ou indécis.
On se fait une liste des quelques modèles qui nous intéressent et après avoir noté les qualités et défauts de chacun, une machine ressort du lot et devrait être l’heureuse élue. Avec la plénitude d’essais en ligne (articles ou vidéos) et les forums de discussion dont plusieurs « experts » offrent gratuitement leurs opinions toujours bien arrêtées, la tâche devrait se comparer à une sinécure. Dans mon cas, rien ne vaut quelques minutes (OK, disons quelques heures) en selle pour me faire une tête à savoir si la moto me convient ou non. J’en conviens, ce n’est pas toujours possible, surtout ici au Québec où essayer une moto sans réel but d’achat n’est pas tellement bien vu…
À une époque lointaine, sans réseaux sociaux ni de Youtube, nous devions patienter jusqu’à la sortie des magazines imprimés, en attendant la seule source d’information valable se constituait des dépliants amassés au salon de la moto ou encore chez son concessionnaire. Si comme pour moi à l’époque, toutes les marques n’étaient pas desservies dans toutes les régions, le choix devenait encore plus limité… Toute cette introduction pour vous dire que je vais m’inspirer du dépliant de la gamme Ninja de Kawasaki (plus spécifiquement la partie traitant de la Ninja 1000SX) afin de passer en revue toutes les nouvelles caractéristiques de ce millésime particulièrement alléchant…
Le titre : « La moto de tourisme par excellence » commence fort. On sait déjà que Kawasaki vise les rouleux en priorité, pas les paradeurs du stand à patates mais bien ceux qui ne vivent que d’un plein à l’autre. Le fait de dire plus bas dans la même page: « -…qui permet aux pilotes expérimentés de vivre une expérience de conduite sport et de tourisme en position décontractée. » confirme que le pilote visé me ressemble, je n’aurai donc pas à jouer un personnage lors de cet essai !
Style plus sportif et dynamique
Moteur quatre cylindres en ligne exaltant
Le couple d’environ 82 pi/lbs à 7200 trs/min permet de démarrer en 5ième rapport (Ne me demandez pas pourquoi j’ai eu cette idée) sans à-coups. J’ai même roulé les équerres en sixième vitesse d’un sens comme dans l’autre à un rythme assez prononcé sans sentir le besoin de rétrograder. On parle ici d’un couple abondant et linéaire là où ça compte avec un petit boost dans les hauts régimes, que du bonbon ! Du côté des chevaux vapeur, on approche les 140, ce qui est bien suffisant pour un usage routier au Québec…
Ensemble de sélecteur rapide Kawasaki KQS
En bon québécois un quick shifter pour monter et descendre les rapports. Nul besoin d’utiliser l’embrayage ni de relâcher la manette des gaz, la seule retenue demeure votre conscience car rendu dans les rapports supérieurs, les chiffres affichés sont comment dirait-on… immoraux ? Son utilisation à régimes plus subtils, surtout en décélération sous les 2500rpm n’est pas conseillée, le système étant tout simplement inactif. Il convient donc en conduite sportive, le levier d’embrayage prenant la relève dans les autres occasions. Gadget ou outil utile ? Je dirais que je ne croyais pas m’en servir aussi souvent, c’est tout dire…
Maniabilité sportive décontractée
« La moto réagit rapidement aux sollicitations du pilote tout en absorbant efficacement les bosses et les ornières. » Cette affirmation fut l’une des premières que je vérifiai en prenant possession de la moto en me rendant chez-moi. Une portion de la route, particulièrement délabrée permet une seule ligne en moto afin d’éviter les trous et ornières. Je fis par exprès de ne pas la prendre pour finalement constater que la Ninja ne s’en offusquait pas le moins du monde, elle semblait même y prendre goût. Le lendemain je mis le cap en direction du Lac Saint-Joseph, ma route de prédilection pour tester les suspensions tellement les bosses y abondent. Petit arrêt en bordure de route afin de régler les suspensions et nous passons à l’attaque. Bien que débordées par l’abondance des bosses (les racines des arbres bordant la route faisant littéralement onduler la route au printemps) les suspensions m’ont permis de garder le contrôle de la bête mais l’expérience ne fut pas des plus agréables et c’est nullement la faute de la moto, il y a vraiment trop de bosses !
Régulateur de vitesse électronique
Un bel ajout qu’on accueille volontiers sur une machine à vocation de tourisme sportif. Facile d’utilisation, on appuie sur le bouton, le témoin apparaît à l’écran, on appuie sur le bouton set- et le tour est joué ! La modification de la vitesse régulée se fait à l’aide des boutons set+ et set- permettant d’y aller au km/h près. Petit bémol, les dénivellations peuvent affecter la vitesse qui met un peu de temps à se corriger, c’est-à-dire qu’elle diminue momentanément lors des montées et augmente quelque peu lors de descentes. Quand même négligeable et aucun stress d’effectuer des excès de vitesse involontaires !
Selle plus confortable
Une selle plus épaisse et plus large devrait améliorer le confort du pilote et du passager. Nous reviendrons plus loin avec ses impressions, mais en ce qui concerne la section réservée au pilote, je peux affirmer que pour des sorties de plus d’une heure en selle, la largeur justement m’a plus dérangée qu’accommodé. Il s’agit ici de goût personnel, mais je préfère une selle étroite aux arêtes arrondies à une plate et aux côté affilés. Par contre l’épaisseur et sa consistance moelleuse m’ont bien convenu pour mon trajet journalier. Avec un peu d’entrainement je parierais que nous ferions bon ménage.
Modes de conduite intégrés sport, route, pluie, pilote (manuel)
Connectivité avec les téléphones intelligents
Une puce Bluetooth intégrée dans le tableau de bord assure la connexion sans fil avec la moto. L’application « Rideology the app » pour téléphone intelligent permet d’accéder aux fonctions de nombreux instruments et d’améliorer votre expérience de motocycliste. J’ai bien aimé mon expérience sans m’en servir… je n’ai pas de téléphone !
Excellente protection contre le vent
Avec cette refonte du modèle, le carénage s’inspire de celui de la Ninja 650 et voit sa bulle ajustable perdre ses rebords recourbés qui me faisaient penser à Mémo dans les 100 tours de Centour ! (pour ceux qui ne comprennent pas l’analogie, faite une recherche Google… vous comprendrez). Parlant d’ajustement et de look, bien que plus petite en superficie, la dite nouvelle bulle travaille très bien et est facile d’utilisation, en autant qu’on ne l’ajuste qu’à l’arrêt… Ce n’est pas que j’aie essayé de l’ajuster en roulant (ce qui est fortement déconseillé par plein d’auto-collants sur le réservoir) mais pour être efficace il vaut mieux se servir de ses deux mains. Quatre positions dont la plus basse donne le plus beau look mais protège le moins… J’ai roulé majoritairement en position deux qui ajustait le flot d’air à la base de mon casque. En roulant à deux, la position trois nous plaçait dans une agréable poche d’air. La position quatre (celle qui rend la moto moins jolie à l’arrêt) m’a plus servi le matin afin de dévier l’air frais de mon cou. J’aime le principe mécanique plutôt qu’électrique, ça ne tombe jamais en panne et retrouver le bon ajustement est un jeu d’enfant.
Prise d’air d’admission
Les papillons des gaz à commande électronique permettent au module de gestion électronique de régler le débit de carburant et le volume d’air admis dans le moteur. L’injection et la position des papillons des gaz optimisent la conduite avec une réponse naturelle et une puissance progressive. En d’autres termes, la livrée de puissance est efficace, point.
Composants de style supersport
Une fourche inversée, un ensemble de freinage avec étriers monobloc à montage radial et un maitre-cylindre de frein avant à pompe radiale, toutes des caractéristiques introuvables sur des machines de sport-tourisme il n’y a de ça que quelques années.
Voilà pour les arguments du dépliant et mes observations.
En complément, voici la version de ma passagère d’un jour.
Point de vue de la passagère :
Je ne vous cacherai pas que ma passagère n’aime pas vraiment son rôle, étant habituée à contrôler sa propre machine, elle se plie toujours au jeu d’essayeuse d’un soir à chaque fois que je veux sa version sur telle ou telle machine. Cette fois-ci ses attentes étaient plutôt élevées étant donné le titre de sport-tourisme associé à la Ninja 1000 depuis son lancement. Pour débuter, elle me confia que l’espace réservé au passager lui sembla plutôt spacieux si on tient compte qu’il s’agit d’une moto sportive (lire ici qu’elle n’avait pas la tête entre les genoux). Assez haute perchée, la vision en avant et sur les côtés reçue une très bonne cote. La protection contre le vent (derrière un pilote bâti comme moi !) avec le pare-brise en position relevée fut aussi très appréciée. Le contrôle des vibrations tant au niveau de la selle que des reposes pieds recouverts d’une épaisse couche de caoutchouc reçu aussi son approbation. Les poignées de maintien situées de chaque côté de la selle offrent une bonne prise et plusieurs choix de positions. Seul point négatif, le confort de la selle qui, après un peu moins d’une heure à arpenter les routes secondaires, commença à incommoder ma passagère. Est-ce qu’avec un peu d’entrainement la durée du temps en selle pourrait s’allonger un peu ? Sûrement !
Mais la convaincre de rouler plus longtemps comme passagère relève presque du miracle…
Cahier de notes : Voici maintenant un petit résumé de mes notes…
- Les ajustements de levier de frein (6) et d’embrayage (5) permettent plusieurs positions pour accommoder plusieurs gabarits, faciles d’utilisation, ils devraient être standards sur toutes les motos.
- L’ajustement de la chaîne de type rotatif est simple d’utilisation, rapide et précis, je ne l’ai pas utilisé sur la Ninja, mais ma ZRX en étant pourvue, j’ai une bonne idée de son efficacité.
- Autonomie : J’aime bien connaître le kilométrage possible avec ce qu’il me reste dans le réservoir, ça permet de planifier les arrêts ou encore de savoir si on peut faire un autre aller-retour au boulot sans risquer la panne sèche. Bizarrement, j’ai pu observer une autonomie optimiste (165km avec une seule barre restante sur l’indicateur) en roulant durant une soirée. J’étais quelque peu sceptique ! Je ne fus pas confondu le lendemain matin lorsque l’autonomie était redescendue à 90km, ce qui est beaucoup plus réaliste… Est-ce dû au rodage de la machine qui n’a pas encore emmagasiné suffisamment de données ? Aucune idée !
- La navigation dans les divers menus peut sembler complexe à première vue, mais une fois le livret du propriétaire consulté et assimilé les différentes particularités, la consultation des informations et le choix des modes de conduite se fait sans heurt. Les deux types d’affichage de l’écran (sport et route) diffèrent par les informations affichées. L’affichage sport étant plus tape à l’œil dans une salle de montre (affichage graphique simulant la rotation de la poignée de l’accélérateur ou de l’application du freinage, affichage du déplacement des masses sur un axe simulant une moto et son pilote). J’ai trouvés ces gadgets amusants, mais aussi distrayants en roulant… Mais comme pour la H2 SX essayée en 2018, l’indicateur d’inclinaison m’a encore pris à son jeu. Je ne réussis pas à améliorer mes chiffres, soit 42 degrés à gauche (J’avais fait un 43 avec la H2) et 47 degrés à droite.
- Je n’ai pas encore parlé des freins et c’est peut-être parce qu’ils se font oublier. Puissants, facilement modulables et un abs peu intrusif même en courbe. Côté suspensions, une fois réglées en fonction de la charge et du type de pilotage envisagé, leur comportement est digne de nos routes !
En conclusion, pour 500$ de plus que le modèle 2019, vous obtenez une moto à la fine pointe de la technologie, facilement transformable en machine de sport-tourisme tout en gardant une allure sportive qui fait jaser les passants… Autrefois un créneau très chaudement disputé, la seule concurrence réelle provient du catalogue Kawasaki avec la H2SX. Mais parce que nous sommes une société distincte, le coût d’immatriculation fait en sorte que la machine suralimenté est passée dans la méchante catégorie des motos à risque, ce qui laisse donc la Ninja seule dans son créneau, mais il s’agit d’un choix logique qui satisfera son propriétaire compte tenu de la somme de ses parties.
- Durée de l’essai : 674km
- Consommation : 5 .88 l/100 km
- Autonomie : 320km
Les spécifications complètes sont ici (Ninja 1000SX) sur le site de Kawasaki.
Marc Paradis, Éditeur Sénior et Pilote d'essai
MagazineMoto.com
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