Vas-y, tu vas revenir un peu plus zen…
La meilleure façon de savoir si une moto de type tourisme mérite à juste titre cet attribut, c’est de la mettre à l’épreuve.
Voici le projet, tout simple, mais efficace:
- Jour 1: Québec – Percé (Gaspésie)
en passant par la vallée de la Matapédia et le sud de la péninsule.
- Jour 2: Percé – retour à Québec
en longeant la partie au nord de la péninsule.
Assurément, la chaleureuse Gaspésie mérite qu’on s’y attarde davantage, qu’on la découvre en plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Un peu comme la vie, le but ici n’est pas seulement la destination, mais le chemin pour s’y rendre. Je veux tester les légendaires qualités de tourisme et de confort de la belle Bavaroise. Côté planification, on parle de 2 jours consécutifs comprenant 1610 km répartis sur 22 heures de route. Surement un peu plus si on ajoute les haltes pour le ravitaillement des pilotes et des motos. J’ai lancé l’invitation à un bon ami. Il a dit oui. C’est paRTi !
Jour 1
Le plein d’essence est fait. En partant de la rive nord de Québec, on franchit le pont Pierre-Laporte et on emprunte l’autoroute 20, direction est. Tôt le matin, on a eu droit à des superbes éclaircies orangé à travers les nuages. Entre Trois-Pistoles et le Bic, l’odeur saline de bord de mer envahit les narines. Le dépaysement et l’aventure s’invitent ! Le premier arrêt s’effectue à Mont-Joli. 350 km d’un trait. La partie d’autoroute en ligne droite est finie pour aujourd’hui. Bonne idée d’avoir branché mon iPod. La moto possède une plus grande autonomie que cela. C’est celle de la moto de mon ami qui était la moindre (350 km quand même…) et on se gardait une marge de sécurité. La pause est la bienvenue: essence, café. On en profite pour enlever une pelure. Je ne suis pas habitué à cette position de conduite plus sportive. Malgré une selle confortable et ferme, des points de pression commencent à se faire ressentir. Après quelques exercices d’étirements, on repart. C’est beau de traverser la Vallée de la Matapédia. Quel décor enchanteur qui s’effectue tout en douceur, d’une courbe à l’autre, en croisant la rivière au saumon à maintes reprises. Un peu de construction sur la route, mais sans excès.
On casse la croûte sur une belle terrasse à Carleton-sur-Mer. Près de 600 km d’effectués depuis ce matin. ‘Ça n’arrête pas de bien aller’, comme dit mon ami André. À la sortie du resto, un couple de propriétaires d’une BMW RT 2004 vient placoter moto. On discute des nouveaux modèles, des nouveaux systèmes, de l’évolution du modèle, des plaisirs de la moto, de la retraite, de la bonne vie quoi. Des gens forts sympathiques. Je les salue.
Souvenir de Carleton-sur-Mer
Après un repas (trop) copieux, on refait le plein d’essence direction Percé. On y sera pour l’heure du souper. L’hôtel est charmant (lire avec beaucoup de charme pittoresque). La bonté, la générosité et la courtoisie des gens chaleureux de la Gaspésie sont toujours au rendez-vous. Honnêtement, je dois avouer que j’ai le popotin un peu amoché. On a roulé près de 12 heures en mode ‘du point A au point B’. C’était peut-être un peu ambitieux comme test. Mais quelqu’un doit se sacrifier (rire). Mais au-delà de cela, la moto s'est comportée comme une vraie routière. Superbe maniabilité, les lignes de courbes sont faciles à maintenir. On ne se bat pas pour la faire tourner. Il n’y a pas de sous virage, que du solide et de la qualité. De belles reprises lorsque nécessaire. Mis à part les fesses, tout va bien. J’ai remarqué que la position de conduite sportive amène les jambes à être repliées et les dessous des pieds sont toujours sous pression. Je dois me dégourdir les jambes de temps en temps en roulant. Mais avouez que 775 km dans la même journée, c’est normal d’avoir quelques petites sensibilités. Je dois être douillet…
Jour 2
On se réveille tôt pour voir le soleil se lever sur le rocher Percé. Quel moment de plénitude. Un goéland vient s’installer dans le décor. On dirait qu’il veut me dire quelque chose. Il garde la pose plusieurs minutes. Je cadre et j’appuie sur le déclencheur.
Merci à Jonathan Livingstone, le goéland
On déjeune et on part très tôt car Dame Nature annonce de la pluie en fin de journée à notre retour vers la ville de Québec. On monte vers le nord tout en longeant la côte, la magnifique baie de Gaspé, le parc Forillon. Que c’est beau et vivifiant de rouler tôt le matin ! La vie s’éveille et prend son rythme pour une autre belle journée. On découvre de surprenantes haltes pour faire quelques photos et humer l’air du bord du fleuve.
L’image du goéland de ce matin me reste dans la tête. J’y pense souvent en roulant et en contemplant les magnifiques routes qui longent la péninsule, entre les montagnes, les falaises et le majestueux fleuve Saint-Laurent. Pourquoi lui ? Pourquoi moi ? Ce matin, à ce moment précis ? Et je roule, et je songe… Je me rappelle le film de Jonathan le goéland…Un classique.
On arrête casser la croûte à Matane. Rien de compliqué, ni trop long et ni lourd. Rendu à La Pocatière, la pluie annoncée devient inévitable: les vents ont changé de direction et de force, ça sent la pluie. On arrête mettre les habits de pluie. On fait le plein. On sait qu’avec l’autonomie la moins élevée des 2 motos, on en a assez pour se rendre à la maison d’un trait. Je passe en mode ‘Rain’. On reprend la route et on entre dans l’averse. Que dis-je ? Le déluge. On réduit la vitesse de croisière. Après quelques minutes, l’intensité de l’orage diminue. Oufff ! En situation d’averse normale, le parebrise, le carénage aérodynamique et ses flancs me protègent relativement bien. La forme de la selle fait en sorte que l’eau ne s’accumule pas dessus. On reste l’assise au sec. Encore une fois, les ajustements à la volée du pare-brise électrique sont très appréciés.
C’est en traversant cette tempête que je fais le lien avec le goéland ! Je vous remets dans le contexte. Le résumé du livre (et du film) de Jonathan Livingston le goéland va comme suit:
La passion du vol entraîne le jeune Jonathan à transgresser tous les interdits, et surtout les lois du Clan. Cela va le conduire à mener une existence littéralement extraordinaire où les périodes sombres alternent avec les matins où «l’or d'un soleil tout neuf tremblait sur les rides d'une mer paisible»1.
Je fais le lien avec l’histoire du goéland et le développement des systèmes si perfectionnés et sécuritaires de cette moto. BMW a investi des années de développement et d’essais/erreurs pour arriver à cette mouture si aboutie toujours plus sécuritaire. Ils sont des précurseurs, des innovateurs, des chefs de file dans le domaine. Ils vont même aux limites de la physique (freinage en courbe avec le système ABS, détection d’angle de cabrage, modulation selon le Mode, etc.). Ils ont surement eu des matins sombres et des matins d’or ! Et maintenant, c’est les motocyclistes qui peuvent profiter de tout ce développement en sécurité. C’est comme rouler sur une mer paisible et de vivre des moments extraordinaires… C’est ce que j’aime, entre autres, de la moto. Celle-ci plus particulièrement.
Une autre belle baie
En cours de RouTe
Après 1600 km en 2 jours, cette moto s’avère être sans accroc pour le volet tourisme. J’ai maintenu une moyenne de consommation d’essence de 4,3 litres /100 km. C’est très bien pour son gabarit, le confort et la puissance disponibles. Une bonne enveloppe calme et une sonorité appréciable m’ont permis d’agrémenter certaines longueurs du trajet en écoutant de la musique. Parlant de sonorité, j’avoisine maintenant près de 6000 km de parcourus depuis le début des essais sur gReTel. La sonorité du silencieux est devenue plus rauque et affirmée. Elle n’est pas bruyante, mais elle dégage davantage sa personnalité et la présence de ce gros moulin de 1200 cc. J’aime bien.
Avec l’accumulation des km, le ronron du moteur à vitesse de croisière devient de la musique. Les BMW on un son particulier, peut-être à cause de la configuration du moteur boxer. Ses vibrations et sa sonorité sont addictives. On veut toujours l’entendre, on veut toujours rouler… Les rapports se passent toujours sans heurt. La course du levier de changement de vitesse est idéale. La transmission 6 vitesses avec entrainement final par arbre élève d’un autre cran la douceur de roulement. J’ai aimé également l’intégration du GPS avec la roulette sur le guidon qui permet d’agrandir ou diminuer l’échelle (‘zoomer’) sur la carte de navigation.
L’adhérence des pneus et leur douceur de roulement sont également dignes de mention. Aucun aquaplanage n’est survenu, même durant le déluge. Les changements de Mode m’ont apporté une sécurité de corps et d’esprit. Les changements de réglage dynamique du châssis (ESA) m’ont fait bénéficier d’une douceur de roulement et d’un confort accru, adapté à mon style de conduite et l’état de la route. Elle s’est vraiment montrée à la hauteur de sa réputation.
Je me suis habitué au système sans clé pour verrouiller et déverrouiller la moto. Un autre volet sécuritaire bien apprécié. Il m’est arrivé souvent de discuter avec des motocyclistes propriétaires de cette marque allemande. Ils sont tous fiers de leur moto. Je ne retrouve pas cela de façon aussi évidente chez les propriétaires des autres marques de moto. Une belle communauté sympathique et active.
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Le mot de la passagère
‘Vas-y, tu vas revenir un peu plus zen’.
C’est le seul commentaire de la passagère pour cet article. On n'a pas fait la route ensemble, car manger de l’asphalte juste pour le plaisir de transformer de l’essence en bonheur, ce n’est pas sa tasse de thé. Et je la comprends: assis sur le siège de pilote, je profite de chaque instant. 22 heures de moto en 2 jours assis en arrière sans piloter, honnêtement, je trouverais cela un peu ordinaire moi aussi. Il y a de ce genre de projet que l’on fait pour soi. Il faut savoir doser bien sûr. Mais lorsqu’on dit: ‘prends soin de toi’, ‘pense à toi’, et bien c’est ce que je fais. Même si on roule en groupe, en duo ou en solo, on est toujours seul avec soi-même dans son casque… Et elle profitera de ma ‘zenitude’ au retour. Pas que j’ai tant de problèmes que cela; les soucis normaux de la vie. Mais de pouvoir les laisser derrière momentanément et faire le plein de vide pour pouvoir les reprendre au retour, ça fait du bien. Les soucis sont patients et ils savent nager. Ils seront encore là à mon retour. Je ne crains pas qu’ils se règlent tous seuls lolll
Je pourrais écrire un article, que dis-je, un essai sur la philosophie et la psychologie du motocycliste. Chacun d’entre nous pourrait l’écrire d’ailleurs, car chacun d’entre nous le vit à sa façon, pour ses valeurs qui lui sont propres et on en retire des sentiments et des états d’âme qui nous comblent et parfois nous sublime. Et ça fait du bien… Est-ce que je suis revenu zen après avoir roulé 1610 km en 2 jours, après avoir vu tous ces beaux paysages, avec le plaisir de conduire cette moto hors du commun, d’avoir partagé du temps de qualité avec mon ami André et d’avoir vécu mon aventure avec Jonathan le goéland ? Hoooo que oui ! ! !
Note 1: Jonathan Livingstone le goéland, Édition Flammarion 1973, page 11.
Pour une troisième année consécutive, BMW Motorrad Canada confie une moto en essai long terme à MagazineMoto.com.
Cette année, c'est une R1200RT 2017 que nous mettrons à l'essai tout au long de la saison. Et encore une fois, c'est avec la complicité de Moto Vanier de Québec que nous pouvons vous faire vivre une saison complète au guidon de la moto.
Martin Dupuis, Pilote d'essai
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